L’invention (de 1943 à 1950)
Les pionniers font le pari de prendre en charge dans les villes les jeunes délinquants et pré-délinquants que les établissements fermés dits "de rééducation" ne parviennent pas à contenir ou à accueillir (expérience de Lille, équipes d’amitié, etc.).
L’enracinement et l’incitation (de 1950 à 1962)
Ces acteurs bénévoles se regroupent et échangent. Une approche commune se dégage (nécessité d’un contact « libre » pour assurer le lien avec les jeunes les plus rebelles, secret professionnel, etc.) et les premiers professionnels sont recrutés : au début 1957 une réunion portant sur les « Clubs et équipes de prévention » (première trace de cette appellation) officialise leur besoin de financements et d’une reconnaissance officielle. La Sauvegarde donne une hospitalité provisoire ; à partir de 1959 avec l’arrêté du 07 janvier sur l’enfance en danger des financements seront progressivement obtenus.
L’institutionnalisation progressive
Du Comité Pichat (1962) à l’arrêté interministériel du 4 juillet 1972.
Le 14 mai 1963 un arrêté du Premier ministre Georges Pompidou crée le « Comité national des clubs et équipes de prévention contre l’inadaptation sociale de la jeunesse », chargé d’établir la liste des expériences engagées auprès des jeunes les plus exclus et marginaux (il restera plutôt connu comme « Comité Pichat », du nom de son président). C’est la première instance dédiée officielle à ce mode d’intervention, chargé de dégager les lignes de force méthodologiques de cette action éducative sans mandat nominatif et s’exerçant librement au sein même des milieux concernés et avec leur participation. Chargé également d’asseoir le rattachement administratif et financier de l’intervention, de Jeunesse et Sport au ministère de la Santé.
En 1971 le tout nouveau Comité national de liaison affirme que « la prévention se définit par un renversement des perspectives de l’action sociale classique ».
La naissance officielle de la prévention spécialisée est actée par l’arrêté interministériel du 4 juillet 1972 et ses huit circulaires d’application. Les textes reconnaissent une forme d’action spécifique en direction des jeunes et des milieux les plus en difficulté. Une méthodologie d’approche des populations s’est élaborée, reposant sur le travail de rue à partir duquel des actions se développent dans des domaines très variés.
Depuis 1981...
Une nouvelle donne de l’action sociale s’est fait jour sur fond de difficultés sociales et économiques grandissantes. De DSQ en DSU, la politique de la ville est venue bousculer l’ordre établi. Les lois du 6 janvier 1986 dites de décentralisation, transférant aux Conseils généraux la compétence de l’aide sociale, la prévention spécialisée, inscrite dans l’aide sociale à l’enfance, se trouve désormais dans le champ de compétence des Conseils généraux. Ce partage des compétences entre l’Etat et les collectivités territoriales, créent non sans une certaine confusion les conditions d’un renouvellement de l’action sociale de proximité. La prévention spécialisée apporte sa contribution et son expertise reconnue en même temps qu’elle procède à de sérieux recentrages sur des options fondamentales et spécifiques et retrouve le chemin de l’action collective qui a parfois été délaissée au profit de l’accompagnement individualisé dans le processus de professionnalisation de ses éducateurs.