Entretien avec Mme Giampino, psychanalyste et psychologue, co-auteur de « Nos enfants sous haute surveillance »
Vous attaquez certaines techniques de dépistage précoce des difficultés psychologiques des enfants
- Sous couvert de prévention, certaines méthodes aboutissent à « déduire ce que les enfants deviendront à partir de qu’ils font ;
on s’oriente alors vers une logique de tri » (traitements…).
« Tout se joue avant 3 ans » : la formule correspond-elle à la réalité ?
- « Les 3 premières années fondent les bases du devenir », mais ce qui ne s’est pas fait peut encore grandir : sinon déterminisme psychologique
Vous revenez sur le rapport Inserm 2005. Emblématique de ce que vous dénoncez ?
- Symptôme de « l’état actuel de notre rapport aux enfants (…) supposés être rois mais, en réalité, ils font peur et on essaie de les contrôler ».
- « On ne peut pas tout cautionner au nom de la prévention psychologique, un interventionnisme mécanique (…) peut s’avérer pathogène »
- Risque d’induire ce que l’on prétendait éviter.
Est-ce pour cela que vous considérez que l’on confond normalité et santé mentale ?
- On est passé d’une vision de construction dans la durée à des grilles de comportements.
- Notamment le DSM-IV : considère qu’un comportement est anormal si son occurrence chez une personne est supérieure à celle de la moyenne de la population. Aboutit aux TC et autres TDAH…
- Approche de la stat et du visible : se heurte au décryptage de la signification des comportements.
Vouloir dépister tôt part pourtant d’une bonne intention.
- Bien sûr mais il faut être attentif aux outils utilisés.
Les professionnels (petite enfance, éducation, travail social) sont-ils influencés par ces courants ?
- On les forme à ces pensées linéaires qui cherchent à « éliminer la logique du symptôme » et proposent des questionnaires comportementaux.
Vous défendez une prévention psy « en rhizome »
- De bons outils existent, sur 3 niveaux.
« Maisons vertes » REAAP, CMPP, PMI, secteurs pédopsychiatrie…
- accompagner la vie ordinaire
- accompagner enfants et familles dans les aléas d’une vie ordinaire (séparations…)
- prise en charge au moment d’un événement grave (handicap, décès…)
- Mais pas assez lisible : il faut améliorer sa cohérence et sa capacité d’évaluation.
Nos enfants sous haute surveillance - Albin Michel - 288 p – 17 €