1. Absence de " Mandat " nominatif
La population n’est pas désignée nominativement. C’est le principe cardinal d’où découlent tous les autres. En effet, c’est parce que la population n’est pas désignée nominativement, c’est parce qu’elle est désignée globalement comme marginalisée, en rupture avec son milieu, que le mode d’approche devra en tenir compte et ce à tous les niveaux : administratif, gestion, pédagogie, modes d’action. Cette locution " absence de mandat " exprime très fortement le décalage avec une approche judiciaire ou administrative. Absence de mandat nominatif ne veut pas dire absence de commande sociale, ni de repérage dans le temps et dans l’espace.
2. La libre adhésion
Il faut être libre pour adhérer à des propositions éducatives
C’est le seul principe que l’on trouve explicitement désigné dans l’Arrêté du 04/07/72, c’est dire son importance : il exprime la démarche "d’aller vers" les jeunes marginalisés, leur milieu, de façon volontaire mais respectueuse du temps nécessaire à l’établissement d’une relation, respectueuse aussi des espaces et des moments favorables aux contacts. Le principe de libre-adhésion reconnaît explicitement la nécessité d’être libre pour adhérer véritablement à des propositions. A contrario il exprime la situation d’opposition, de refus des institutions, de malaise et de mal être dans laquelle se trouvent les jeunes ciblés par la Prévention Spécialisée.
3. Le respect de l’anonymat
Avant qu’une relation ne s’instaure, il peut s’écouler des semaines, des mois…
Conséquence directe de l’absence de mandat et de la libre-adhésion, le respect de l’anonymat se comprend mieux dans l’interaction avec les autres principes. L’absence de mandat nominatif implique qu’il est indispensable de recueillir l’adhésion du jeune pour pouvoir avoir une influence sur lui. Mais avant qu’une relation ne s’instaure et puisse être qualifiée d’éducative, il peut s’écouler des semaines, des mois… Les jeunes gardent l’initiative de l’élaboration et du maintien, ou non, de cette relation ; cette maîtrise de l’initiative est garantie par l’anonymat, s’il est préservé. La finalité de l’intervention est bien que le jeune sorte de l’anonymat sans être réduit à son problème, pour " devenir quelqu’un ".
4. Inter-institutionnalité ou Partenariat
Il n’est pas possible pour des éducateurs d’agir seuls
Ce principe est "consubstantiel" de l’existence de la Prévention Spécialisée ; on le trouve implicitement évoqué dans l’article 5 de l’arrêté interministériel de 1972."... L’action éducative de ces organismes (clubs et équipes de prévention) est conduite en collaboration avec les services sociaux, les groupements et établissements socio-éducatifs et culturels ". La mission visant, comme le rappelle la loi du 6 janvier 1986, à "prévenir la marginalisation et faciliter l’insertion ou la promotion sociale des jeunes et des familles", il n’est pas possible pour les éducateurs d’agir seuls. Pour faciliter cet accès des jeunes aux équipements de formation, de loisirs, au monde du travail, à l’amélioration des relations avec leur famille et leur environnement, les éducateurs doivent être en contact avec ce que l’on pourrait nommer de façon générique les "institutions".
5. Non-institutionnalisation des activités
Il faut rester souple en matière de partenariat
Le terme est un peu obscur mais s’éclaire lorsqu’on vient l’illustrer en parlant de souplesse de mobilité, d’adaptabilité, de relais à mettre en œuvre.
La Prévention Spécialisée est conduite bien souvent à créer des réponses inexistantes dans le milieu concerné. C’est la capacité d’adaptation aux problèmes rencontrés qui légitime la diversité des actions mises en œuvre.
Dans la durée, des relais sont installés ; ou bien une action s’avère répondre ponctuellement aux besoins d’un groupe de jeunes et disparaît lorsqu’elle n’a plus de raison d’être, ou bien elle perdure, se structure et s’autonomise alors (création de clubs sportifs, d’association de jeunes, d’entreprise d’insertion, ...).
Lorsqu’une nouvelle création s’avère viable par elle-même, la P.S. a pour principe de s’en retirer, en conservant toutefois la possibilité de jouer son rôle d’accompagnement relationnel. Le principe de non-institutionnalisation s’applique donc aussi à la P.S. elle-même, puisque son objectif doit être de réparer et non pas de perdurer sur une même zone lorsque le bilan de son action a démontré son efficacité.
6. Le support associatif
La Prévention Spécialisée est basée sur des méthodes nécessitant souplesse, proximité, réaction rapide, relative autonomie. Le cadre associatif paraît le mieux adapté à répondre à de telles exigences et, presque toutes les équipes sont gérées par des associations.
Le rapport d’évaluation des politiques publiques, réalisé en 1991 dans le domaine de la prévention collective de l’exclusion des adolescents en difficulté, souligne cette dimension importante de l’action éducative et sociale conduite en Prévention Spécialisée.
Eviter d’être semblable aux institutions que les jeunes rejettent
La Prévention Spécialisée a certes une mission de service public à remplir. Pour autant, elle ne doit pas devenir un service Public ". Dans un cadre contractualisé avec le département et les communes, les associations de Prévention Spécialisée constituent des moyens et des lieux où s’exerce fondamentalement une fonction de lien et de liant social, de solidarité et de proximité, de révélateur de nouveaux enjeux collectifs pour contribuer activement à la lutte contre la marginalisation et au renforcement de la cohésion sociale.