L’addap13 a 50 ans, ce qui est aussi l’âge moyen de la Prévention Spécialisée en France ; et pour moi aussi c’est un anniversaire puisque cela fait 30 ans que, dans 4 départements et 6 collectivités, on m’a confié le dossier de la prévention spécialisée de manière continue et pas toujours dans le cadre de la mission de l’Aide Sociale à l’Enfance.
Dans le 1er département, au moment de la décentralisation, c’était pour déconventionner toutes les associations de Prévention Spécialisée au motif qu’elles travaillaient repliées sur elles-mêmes et qu’il n’était pas facile de voir ce que faisaient certaines d’entre elles.
Dans le 2ème département, après la décentralisation, fort développement de la Prévention Spécialisée, associative mais aussi publique. C’était la grande période des politiques d’insertion des jeunes, des opérations Habitat Vie Sociale et Développement Social des Quartiers, des postes d’éducatifs financés par des bailleurs sociaux, des chantiers éducatifs…etc.
Dans le 3ème département, la Prévention Spécialisée avait implosé ou explosé quelques années auparavant, mais le besoin s’en faisait sentir et il a fallu longuement expliquer l’intérêt de ce mode d’intervention avant que les collectivités en acceptent finalement la création.
Dans le 4ème département, les Bouches du Rhône, l’organisation paraît plus simple : l’addap13 occupe le terrain, en lien avec d’autres partenaires qui œuvrent en direction de la jeunesse. Une grosse association départementale avec ses 170 travailleurs sociaux, implantés sur la quasi-totalité des villes du territoire. On ne m’a pas demandé de la déconventionner.... mais d’en assurer le suivi, le contrôle, la tarification… comme pour l’ensemble des associations conventionnées.
La première des actions a été de la soumettre à une procédure d’autorisation pour qu’elle soit inscrite dans la nomenclature des établissements et services relevant de la loi de 2002. Vraie reconnaissance de la compétence de l’association à exercer une mission éducative de Prévention Spécialisée pour les 15 ans à venir. Il en a été de même pour la Maison de l’Apprenti.
Mais surtout de constater l’important travail réalisé en commun avec les services sociaux ou éducatifs et d’autres associations qui sont confrontées aux mêmes réalités de terrain.
LA PRÉVENTION SPÉCIALISÉE UN MAILLON DE LA PROTECTION DE L’ENFANCE ?
Le code de l’action sociale et des familles dit que la Prévention Spécialisée relève de la mission de Protection de l’Enfance. Son financement est assuré à titre principal par les Conseils Généraux sur le budget de l’Aide Sociale à l’Enfance.
On peut délimiter 3 champs dans la Protection de l’Enfance, tels que définis dans la loi du 5 mars 2007 (celle qui réforme la Protection de l’Enfance !) :
- la prévention
(accompagnement des enfants et des familles dans leur milieu de vie) ; - le dispositif des informations préoccupantes
(prévention de l’enfance en danger) ; - la protection administrative ou judiciaire qui éloigne l’enfant de sa famille (placement hors du domicile)
il ne se résume plus aujourd’hui à l’internat éducatif ou à la famille d’accueil mais évolue vers des prises en charge plus diversifiées.
La Prévention Spécialisée est bien positionnée dans la Protection de l’Enfance qui dans sa définition de 2007 recouvre aussi la prévention. Elle en est selon moi en effet un maillon fort. Principalement dans le champ de la prévention mais également dans celui de la protection.
PRÉVENTION
Si les Conseils généraux, depuis les grandes lois de décentralisation, ont beaucoup développé les actions de prévention spécialisée c’est qu’il y avait un intérêt :
- d’abord le mode d’intervention spécifique des éducateurs dits de rue, soutenu par ses grandes principes (respect de l’anonymat, mandat non nominatif…) ;
- son immersion dans le tissu social du quartier ou de la ville induisant sa connaissance des jeunes et de leurs familles ;
- la diversité des pratiques entre action individuelle et action collective ;
- l’obligation de ne pas travailler seule mais avec l’ensemble des partenaires de son espace d’intervention.
- plus récemment quand elle se propose de se recentrer sur l’accompagnement des plus jeunes (préados, ados ) et de ce fait développe des interventions en direction des familles
(cf. les Assises de 2002 à Marseille).
Ce mode d’intervention complète celle d’autres professionnels : services sociaux départementaux, scolaires, services éducatifs qui œuvrent auprès des jeunes mais aussi de leurs familles (dans le cadre d’activités sociales générales ou de mesures administratives ou judiciaires).
L’intervention de l’addap13 vient aussi s’articuler aux mesures d’Aide Éducative à Domicile à Aix (plateau d’Arbois en direction de familles de gens du voyage) ou aux actions de développement local (quartier du Trébon en Arles).
L’association participe également au co-pilotage du dispositif départemental des animateurs jeunes dans les centres sociaux (38 postes).
Des expériences nouvelles ou innovantes ont été développées récemment : par exemple le service de prévention de fin de journée sur l’hyper centre de Marseille.
Quand on compare la situation du département des Bouches du Rhône par rapport à celle des autres départements français, au regard des enfants placés, nous nous situons dans la 2e partie de la liste.
Cela peut paraître étonnant au vu des difficultés sociales et familiales rencontrées dans ce département.
La Prévention Spécialisée développée par l’addap13 y est sûrement pour quelque chose avec ses 180 éducateurs sur 22 villes (83 points de travail), ses 6 800 jeunes suivis (soit 2800 familles). C’est aussi le résultat des activités développées par d’autres associations de quartier.
La loi 2007 a souhaité réviser le dispositif enfance en danger en mettant en place celui des INFORMATIONS PRÉOCCUPANTES
(suite aux procès d’Angers et Outreau)
Quand cette loi de 2007 est parue, je ne pensais pas a priori avoir la Prévention Spécialisée dans le champ des participants actifs ! Eh bien oui pourtant la Prévention Spécialisée s’implique dans ce domaine :
- 110 situations issues de l’addap13 en 2009 dans le cadre de ce dispositif des Informations préoccupantes ;
- Collaboration avec les Maisons de la Solidarité sur des analyses de situations ;
- Participation au groupe de travail inter institutionnel sur la cellule départementale de recueil de traitement et d’évaluation des Informations Préoccupantes.
PROTECTION
- Collaboration avec les Maisons de la Solidarité et les Inspecteurs enfance sur les Accueils Provisoires Jeunes Majeurs ;
- Collaboration sur le logement des jeunes ;
- Participation à la plate forme départementale pour l’accompagnement des Mineurs Étrangers Isolés par le biais d’un service nouveau en lien avec le Service des Procédures Urgence Enfance, le Parquet et le Tribunal pour enfants, la DPJJ et la Sauvegarde de l’enfance : le Service d’Accueil et d’Accompagnement des Mineurs Étrangers Non Accompagnés
(SAAMENA, créé depuis 2 ans).
Proposer à l’addap13 d’être membre de l’Observatoire départemental de la Protection de l’Enfance, pour représenter la Prévention Spécialisée, en l’associant aux travaux du Schéma enfance famille, c’est reconnaître que ce mode d’intervention éducative conserve sa spécificité et continue d’agir en complémentarité des autres acteurs de la Protection de l’Enfance.
Nous avons des enjeux communs à partager autour de l’adolescence : accompagner ce passage vers une vie d’adulte est de plus en plus difficile. En cette période tourmentée et avec en perspective de grands bouleversements législatifs, le regard porté sur les jeunes relève aujourd’hui beaucoup de la défiance. Face à ces évolutions et à la multiplication des situations de violence, nous avons à répondre à de nombreuses questions et il nous faut trouver des moments d’élaboration collective pour ouvrir de nouvelles perspectives.
Je terminerai par une citation rassurante de La Rochefoucault retrouvée ce week-end en rangeant un grenier :