M. Guillaume Allègre
Economiste OFCE (Sciences-Po)
Le RSA vise un objectif redistributif : il peut être bénéfique pour les gens les plus proches du marché du travail ou avec RMI ou emplois précaires et restant pauvres. Mais même avec le RSA beaucoup resteraient « dans un halo de pauvreté »
Et on ne propose rien aux plus éloignés de l’emploi. Les minima sociaux augmentent moins vite que les salaires et leur pauvreté se creusera.
Aspect incitatif : pour trouver du travail la première condition c’est qu’il y en ait. Il faut d’abord créer de l’emploi.
Si la part de l’allocation restant à la personne avec la reprise d’emploi (taux de cumul) est de 70 %, ce sera trop cher. Mais en diminuant ce taux pour le RSA on pourrait augmenter les minima sociaux et financer des mesures non monétaires (santé, logement, accueil enfants…).
Du rapport Hirsch 2005, on n’a retenu que les mesures monétaires : mais la pauvreté est multidimensionnelle.
Certains craignent un effet pervers : favoriser emplois précaires. Possible mais uniquement si l’incitation fonctionne pour ces emplois. On peut pénaliser les entreprises qui proposent ces emplois
Autre effet pervers : le RSA est calculé en fonction des revenus du foyer. Mesures de ce type testées aux USA et il y a eu un effet désincitatif sur les femmes… plus fort que l’effet incitatif sur les inactifs !!!
En France aujourd’hui le passage de la mono-activité à la bi-activité est rémunérateur, ce serait moins vrai avec le RSA et c’est très important : en cas de rupture par ex. les femmes sans emploi sont menacées par la pauvreté.
Financement ? on annonce la suppression ou l’intégration de la prime pour l’emploi.. qui va aux salariés entre 1 et 1,3 smic : les classes populaires et moyennes paieront le RSA ?
La logique de solidarité voudrait que ce soit financé par l’impôt sur le revenu, selon moyens de chacun
M. Michel Dinet, Pdt (PS)
du Conseil Général de Meurthe-et-Moselle
Il faut se rappeler que c’est une expérimentation et on veut l’étendre dès 2009 avant évaluation…
Deux conditions nécessaires pour qu’il réduise la pauvreté : qu’il s’inscrive dans une politique globale plus redistributive… on peut en douter. Et que soit forte la volonté de lutter contre les temps partiels subis. Ne paraît pas un enjeu majeur…
Il ne faut pas solvabiliser une nouvelle catégorie de travailleurs pauvres avec « allocation/salaire »
Présenté comme un complément social du revenu du travail. Il faudrait qu’il soit accompagnement au retour à l’emploi durable.
Et les personnes les plus éloignées de l’emploi ? Le RMI doit être garanti (avec son travail vers l’insertion). Il ne faut pas abandonner l’objectif de la socialisation du plus grand nb par le travail.
Financement : porterait sur Etat et Dpts.
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D’accord pour financer l’animation du dispositif mais les allocations doivent relever de la solidarité nationale.
Ne pas reproduire ce qui s’est passé avec le RMI.
Il ne faudrait pas l’Etat se borne à organiser de nouvelles solidarités assumées par les collectivités locales : ce serait source de conflit avec risque d’éclatement de la solidarité.
M. René-Paul Savary, Pdt (UMP)
du Conseil Général de la Marne
On voit les limites du RMI qui date de 1988 et il est positif qu’on expérimente une adaptation. Peut être un moyen de réduire le nb de personnes sous le seuil de pauvreté.
Mais paraît plus un moyen de lutte contre la pauvreté qu’un moyen d’insertion : peu adapté aux personnes les plus éloignées de l’emploi, celles qui ont besoin surtout d’accompagnement social.
Pour celles-ci il faut continuer le contrat d’insertion du RMI.
Le RSA suscitera-t-il un engouement ? C’est une inconnue. Chez les employeurs en revanche un effet d’aubaine est possible : il faut encadrer le dispositif et que les entreprises s’impliquent.
« Le RSA ne doit pas être un guichet ouvert » : il faut le proposer de manière adaptée et ciblée
Autre pb : on ne sait pas comment les personnes en sortiront ni si elles pourront en sortir…
Chaque Dpt a pu adapter l’expérimentation mais pour l’évaluation il faut des critères communs et la généralisation ne sera pas tout à fait semblable aux expérimentations.
Il aurait mieux valu attendre la fin des expérimentations et aussi parce que le coût nous inquiète. Nous n’avons pas assez de précisions.
Un point sur l’avancée du dispositif
M. Sarkozy RSA « extrêmement intéressant (…) à calibrer en fonction des disponibilités financières qui sont les nôtres » (8 avril 2008)
M. Hirsch : ne veut pas d’un RSA « au rabais »
Quant à l’ADF, elle s’inquiète : un transfert serait « inacceptable »
Un point sur l’avancée du dispositif
M. Sarkozy RSA « extrêmement intéressant (…) à calibrer en fonction des disponibilités financières qui sont les nôtres » (8 avril 2008)
M. Hirsch : ne veut pas d’un RSA « au rabais »
Quant à l’ADF elle s’inquiète : un transfert serait « inacceptable »
Le 24 avril, M. Sarkozy évoque un coût de 1 à 1,5 milliards plus un redéploiement partiel de la PPE qui bénéficie à 8,6 millions de foyers fiscaux
(Coût de la généralisation estimé de 2 à 3 milliards)
M. Hirsch : estime que cela permet de faire la réforme dans de bonnes conditions pour 2009. Recentrer la PPE ne lui paraît pas une mauvaise chose (les syndicats y sont hostiles)
Réactions
Uniopss : favorable à condition que les plus éloignés de l’emploi ne soient pas laissés de côté
Accord de principe avec remarques :
La sortie de la pauvreté par l’emploi « est loin d’être toujours possible » ; il ne faut abandonner personne.
Préconise un revenu minimum d’existence sans condition, indexé sur les prix. Possibilité de contrat (action santé par ex.) mais sans sanction.
Ne pas abandonner l’ambition initiale du RMI « sa vision large de l’insertion sociale »
Les jeunes doivent entrer dans le RSA (droit commun)
Il faut renforcer service public emploi (accompagnement personnes éloignées de l’emploi)
Maintenir un volume important de contrats aidés.
Faire attention aux effets d’aubaine.
La pauvreté atteint aussi des personnes « dans l’incapacité de retrouver une dignité et une légitimité sociale par le moyen du travail »
Mvt national chômeurs et précaires(MNCP) : « le RSA ne doit pas être une solution durable à la précarité mais un marchepied » ; demande un droit opposable à un revenu minimum, déconnecté de la notion de retour à l’emploi et indexé sur le coût de la vie