Le 4 mai dépôt d’une proposition de loi visant à réprimer « la participation à une bande violence » et les « violences avec port de la cagoule »
Mme Bordet est psychosociologue
On dit que les jeunes des banlieues sont de plus en plus violents ? partagez-vous ce constat ?
- Il y a une grande diversité dans ces « banlieues » ;
- Par endroits on observe des formes de violences inquiétantes et aussi des autodestructions, mais tous les territoires ne « plongent pas » : se demander pourquoi est la vraie question.
- Souvent les territoires "violents" ne sont pas porteurs d’une appartenance symbolique ni d’une visibilité en terme d’avenir (emploi…).
M. Sarkozy dénonce souvent ce qu’il appelle « la culture de l’excuse sociale à la délinquance » ; mais les racines ne sont-elles pas là ?
- Il ne faut pas généraliser : il y a des agressivités pathologiques, mais tous ces jeunes ne sont pas a priori violents et il faut tenir compte de ce qu’ils vivent (à travers ce que vivent leurs parents).
Le phénomène des bandes est-il une révolte contre une société qui neleur laisse pas de place ?
- S’y exprime surtout « quelque chose de l’ordre de l’insupportable » : la révolte suppose d’analyser une situation, ce qu’ils ne font pas. Casser c’est exister (avec un plaisir lié à leur âge aussi).
- Il faut parvenir à inverser cette énergie : ils ont besoin de supports positifs chez les adultes.
- Les lois actuelles les enferment entre débrouille et justice, ce qui détermine la violence.
N’y-a-t–il pas un risque qu’ils s’approprient cette image négative ?
- « Cette question de l’intégration du stigmate est centrale » : par réaction, ils revendiquent image et transgression (comme beaucoup d’ados).
- Mais quand on discute avec eux en petits groupes, ils reconnaissent que ce n’est pas formidable ; ils ont les mêmes aspirations que tout le monde.
- Dans ces « quartiers » tous les jeunes ne sont pas là-dedans… mais quand ils obtiennent un diplôme, c’est plus difficile pour eux de trouver du travail… et ça c’est un gros pb : comment les convaincre qu’on leur offre autre chose ?
Comment sortir de cette spirale sécuritaire ?
- Il faudrait déjà admettre que l’on y est. Cette société vieillit, et s’inquiète… alors on continue.
- Et les subventions aux assocs diminuent, on les octroie souvent pour des projets « assez normatifs », on infléchit orientations PJJ…
- Même si on n’a pas encore basculé : « ainsi la prévention spécialisée conserve encore une certaine autonomie »
Que proposer pour accompagner ces jeunes ?
- Il faut garder la confiance des jeunes et des familles ;
- préserver le travail d’accompagnement sur la durée et ne pas réagir au cas par cas (là on est dans le sécuritaire) ;
- « faire avec » en s’appuyant sur la communauté : écoles, habitants, services sociaux, police…. ;
- avoir une présence reconnue des institutions, ce qui va à l’inverse des diminutions d’effectifs actuelles.
« L’acquis de la République c’est la présence de la puissance publique au plus près des populations » il ne faut pas laisser la place vide : risque de dérive confessionnelle et économie parallèle notamment.
« Nous sommes tous interdépendants et on ne peut pas mettre de côté ces jeunes » Si l’on continue ce sera pire.
On peut également voir :Il faut revenir à l’analyse des causes de la délinquance, par M. Mucchielli